Ça se passe dans le Languedoc - Abricotiers, oliviers, poivriers : quand l'arbre s'associe intelligemment avec la vigne

Il y a 2 années 869

Agroforesterie, œnotourisme, diversification des productions et évolution des circuits de vente. À l’Enclos de la Croix (Hérault), la nouvelle stratégie engagée il y a quelques années semble s’avérer payante.

Il y a 7 ans, sur le domaine familial l’Enclos de la Croix, à Lansargues aux portes de Montpellier, François Frézouls a choisi de transformer les 23 hectares de vignes d'un seul tenant en 15 clos de 1 à 2 ha. Objectif : apporter davantage de biodiversité en travaillant dans des parcelles plus petites, entourées d’arbres. « Le premier clos assez expérimental, planté en 2017 en petit manseng et riesling, est terminé, et le travail porte ses fruits », se félicite le vigneron. Pour le second clos, c’est le cépage résistant floréal qui a été choisi. « Nous n’avons fait que deux traitements cette année, et les raisins étaient très sains. » François Frézouls mise également sur des cépages plus anciens, comme le vidal, également pour sa bonne tenue face aux pressions des maladies, aux côtés du cabernet, du sauvignon, du merlot, du cabernet franc et du petit manseng.

Mais à l’Enclos de la Croix, c’est bien l’arbre qui a depuis quelques années pris une place importante. « L’agroforesterie doit être abordée dans une vision très globale ! » insiste le vigneron, qui multiplie les expériences et leurs valorisations, sans aucun triomphalisme. « Les erreurs, nous les avons certainement toutes faites ! » plaisante-t-il. Un pépiniériste lui a conseillé un jour de choisir des essences présentes à 400 km plus au sud, en vue d’une adaptation au changement climatique. Mais le résultat n’a pas été probant. « Cette hypothèse nous conduisait à Séville, alors j’ai planté des pistachiers et agrumes… mais sans résultats ! » L’allée de cormiers non plus n’a pas poussé correctement. Autre enseignement : ne pas planter des arbres trop grands pour espérer gagner du temps (coût supérieur et taux de reprise plus faible), et préférer planter moins pour mieux s’occuper de chaque plant (irrigation, protection, etc.)

Abricotiers et arbres fourragers

Parmi les réussites : la plantation d’abricotiers, tous les 6 rangs, sur un îlot de cabernet sauvignon, avec une première récolte de 400 kg de fruits cette année. « Nous avons investi dans un enjambeur pour traiter trois rangs à la fois, ce qui limite les tassements de sol, et nous a permis de planter il y a 5 ans des abricotiers à la place de manquants tous les 6 rangs », précise le vigneron, qui a fait des confitures ensuite vendues au domaine. Oliviers et poivriers du sichuan ont aussi été plantés, permettant de vendre huile d’olive et poivre aux visiteurs. Autre réussite : des féviers d’Amérique dont les gousses nourrissent les moutons lors des périodes sèches, et des éléagnus qui servent de fourrage aux animaux également en été quand l’herbe se fait rare.

Au total, la plantation d’arbres et arbustes fera perdre au domaine 4 ha de vignes, chiffre le vigneron, soit 20 % de vendange en moins. « Cela s’anticipe », insiste-t-il. Pour compenser, il a revu la valorisation de ses vins : arrêt du négoce, forte baisse de l’export, hausse de la valorisation du prix de la bouteille avec développement de l’accueil œnotouristique (gîte, visites, accueil de groupes). « Aujourd’hui, nous sommes à 13 euros TTC par bouteille en moyenne, avec des paniers moyens autour de 250 euros au caveau, se félicite-t-il. C’est un autre modèle économique, qui n’est possible que grâce à une position stratégique : à 3 km de La Grande-Motte, et très proche de Montpellier. Cela nous permet de toucher de nombreux touristes. »

Attrait des visiteurs pour les arbres

S’ils sont référencés sur Rue des Vignerons et Airbnb Expérience, François et sa fille Agathe ont vu dans l’évolution de leur approche viticole le moyen d’attirer plus de monde et de faire passer leurs messages. « Nos visiteurs s’intéressent aux animaux, aux arbres puis au vin. Nous leur conseillons ainsi télécharger PlantNet avant de se balader dans les vignes, pour découvrir les diverses essences. L’accueil de plus en plus de séminaires sur notre domaine amène à de nombreux échanges sur les arbres, et des plantations sont même organisées avec des groupes. Il y a une vraie appropriation du public autour de cette nouvelle approche, qui vient enrichir un modèle économique qui se cherche encore », termine le vigneron.

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